Nouveauté en France, et partant de l'idée que « l'union fait la force », des mutuelles communales ont commencé à se créer aux quatre coins du pays. Mais est-on devant une idée d'avenir ou bien d'un phénomène de mode ? Notre zoom sur le fonctionnement et les avantages de cette institution originale va essayer de répondre.
Mutuelle communale : une idée basée sur des constats inquiétants
Un constat de départ
À l'origine du projet, le constat fait par une élue communale du Vaucluse de l'augmentation notable des demandes d'aide recensées par le Centre Communal d'Action Sociale (CCAS) de la commune.
En effet, le recul de la protection sociale dont le niveau de prise en charge est en baisse constante, la perte de pouvoir d'achat des retraités, la hausse des tarifs des assurances santé et la dégradation des revenus consécutive à la stagnation de notre économie, ont abouti à une précarisation d'une part croissante de la population, qui doit renoncer à se soigner.
Remarque : ce constat a été confirmé par une étude de la Mutualité Française, qui fait ressortir la hausse du nombre de personnes non couvertes en complémentaire santé intervenue entre 2012 et 2013.
Comment lutter contre ce phénomène ?
Si la prise en charge des plus démunis est assurée par des systèmes comme la PUMA (protection universelle maladie) et la Complémentaire santé solidaire (CSS), rien n'est prévu pour ceux qui, à quelques euros près, ne peuvent prétendre à ces dispositifs d'aide.
À noter : le 1er novembre 2019, la CMU-C et l'Aide à la Complémentaire Santé (ACS) ont fusionné pour devenir la Complémentaire santé solidaire (article 52 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019). Cette complémentaire santé est gratuite pour les personnes qui étaient éligibles à la CMU-C et soumise à participation financière pour celles qui étaient éligibles à l'ACS. Les droits restent les mêmes que ceux appliqués dans le cadre de la CMU-C. Les bourses d'études accordées sous condition de ressources ne sont pas prises en compte dans les revenus. Ce sont les éléments figurant sur le dernier avis d'imposition connu qui sont retenus. Depuis le 1er janvier 2022, les bénéficiaires du RSA bénéficient automatiquement de la CSS, sauf opposition expresse (loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021). Depuis le 1er avril 2022, les démarches pour accéder à la CSS sont simplifiées pour les bénéficiaires de l'ASPA qui n'ont plus à remplir la déclaration de ressources (décret n° 2022-565 du 15 avril 2022).
Partant de l'idée que « l'union fait la force », revenir à la mutualisation du risque, base même de la notion d'assurance, s'imposait : faire porter le risque propre à chacun sur le plus grand nombre et mettre en place une solidarité intergénérationnelle.
Effet de groupe
Les communes, ou dans certains cas l'association qui y a été créée pour piloter le projet, procèdent en 5 temps :
- recenser les besoins en interrogeant la population ;
- déterminer le nombre d'adhérents potentiels et cerner leur attente en termes de garanties et de prix ;
- établir un cahier des charges soumis à divers assureurs ou organismes mutualistes ;
- négocier avec ceux qui sont intéressés par le projet les meilleures conditions de garanties, de tarif et d'adhésion ;
- enfin, retenir la meilleure proposition et recueillir l'adhésion des habitants intéressés.
Précision : une fois l'accord trouvé, la gestion du contrat peut se faire par les services communaux, par l'association, ou directement par l'organisme retenu.
Avantages et avenir de la mutuelle communale
La mutualisation du risque et la solidarité à l'intérieur du groupe permettent d'obtenir un tarif moyen plus compétitif que celui qu'auraient pu trouver à titre individuel la majorité des adhérents.
Dans certains cas, elle permet même à certaines personnes qui ne pouvaient se payer une garantie complémentaire, d'y avoir désormais accès.
Accès des plus fragilisés à une prise en charge au meilleur prix
Exemple : la commune de Caumont-sur-Durance (84), à l'origine de l'idée, permet à 265 foyers de bénéficier d'une garantie assez complète pour 47 € par mois et par personne.
On constate en particulier un effet bénéfique pour les seniors, pour qui l'économie est parfois très sensible (jusqu'à 60 € par mois). Le gain réalisé est donc indéniable.
D'autre part, souvent les contrats négociés et signés abrogent toutes les conditions qui sont habituellement des freins à l'acceptation par l'organisme assureur :
- pas de limite d'âge ;
- pas de délai de carence ;
- pas de questionnaire de santé.
Enfin, avantage non négligeable, l'adhésion à un contrat communal supprime pour les habitants les tracas inhérents à la recherche d'une garantie performante à un prix attractif.
Avenir encore incertain
L'idée est séduisante et son développement semblait jusque-là prometteur, puisque nombre de communes étaient candidates à son adoption. Cependant, divers facteurs peuvent en perturber le bon fonctionnement.
En premier lieu, la mise en œuvre de l'obligation faite aux entreprises depuis le 1er janvier 2016 de fournir à leur personnel un contrat de groupe. L'impact de cette disposition de la loi ANI peut en effet faire craindre que trop peu de salariés ne soient intéressés par la mutuelle communale.
Ceci amènerait inexorablement à une anti-sélection, qui viendrait déséquilibrer les groupes d'assurés et induirait immanquablement l'inflation des tarifs. C'est ce qui a d'ailleurs été constaté dans la commune de Caumont (exemple cité plus haut), qui malgré la progression de l'effectif assuré, a vu les cotisations augmenter de 12 % entre 2013 et 2014.
Défendre l'avenir des mutuelles communales
Peut-être faut-il traiter le problème à l'échelon supérieur des communautés de communes et en incitant les entreprises à adhérer elles aussi à la mutuelle communale de leur secteur.
Ainsi pourrait-on espérer conserver le caractère véritablement « mutuel » de cette idée sympathique et pérenniser ainsi la notion d'entraide, dans une société qui tend à s'individualiser à l'extrême.
Pour en savoir plus :
- La mutuelle d'entreprise est une mutuelle groupée, qui a pour vocation de prendre en charge une partie des frais des dépenses de santé des salariés d'une entreprise.
- Découvrez toutes les conditions et les modalités de la résiliation de votre mutuelle, assurance santé ou complémentaire santé, quel que soit le motif de votre démarche.
- Le remboursement dentaire commence avec le remboursement de la Sécurité sociale, la mutuelle dentaire prend ensuite le relais.